Copenhague : l’écart se creuse entre science et politique !
Article mis en ligne le 2 février 2010
dernière modification le 4 octobre 2014

Paris, le 1er février 2010 - Alors que le sommet de Copenhague s’était soldé par un accord au rabais, les Etats du monde entier avaient jusqu’au 31 janvier pour annoncer s’ils s’associaient à l’accord de Copenhague, et si oui avec quels objectifs et plans de réduction de gaz à effet de serre. Véritable échec politique, le sommet s’était terminé sur l’adoption par une trentaine de pays d’un texte vague, catalogue de bonnes intentions, sans véritables contraintes pour les principaux pollueurs de la planète. Aucune nouvelle annonce n’est attendue et les principaux émetteurs se sont contentés de rappeler des objectifs déjà connus (pour suivre et comprendre les engagements des différents pays, consultez le tableau récapitulatif du RAC Etats-Unis (CAN) en cliquant sur ce lien : http://www.usclimatenetwork.org/policy/copenhagen-accord-commitments en anglais)

L’écart entre science et politique : un gouffre de 3 à 5 Gigatonnes d’équivalent CO2

  • Pour Elise Buckle du WWF, « les objectifs de l’UE, l’Inde, le Brésil et le Japon sont insatisfaisants ; ceux des Etats-Unis, de la Chine, de la Russie, du Canada et de l’Australie sont très largement insuffisants. L’écart se creuse entre l’objectif scientifique des 2°C et les objectifs politiques annoncés qui nous emmènent vers 3, voire 4°C d’augmentation de la température globale. L’écart à combler est de 2 à 5 gigatonnes au minimum. A titre d’exemple, les émissions annuelles de l’Union européenne en 2007 étaient de 4 gigatonnes ! ». L’objectif de limiter le réchauffement de la planète en deçà de 2°C contenu dans l’accord de Copenhague fait ainsi office de vœu pieux, les pays industrialisés n’ayant aucune intention de s’y tenir et d’augmenter le niveau d’ambition de leurs engagements. Rappelons qu’AOSIS, alliance de 42 Etats côtiers ou insulaires et 80 pays les moins avancés, place la survie en deçà de 1,5°C.

Une Europe qui sonne comme un disque rayé

  • Plusieurs pays se sont empressés de rebondir sur l’échec de Copenhague pour revoir leurs engagements à la baisse en premier lieu l’Australie qui privilégie désormais un maigre objectif de réduction de ses émissions de 5% pour 2020 au lieu du -15% conditionné qu’elle avait annoncé l’année dernière. Sans surprise, l’Union européenne a réitéré son objectif : une fourchette de 20 à 30% de réduction de ses émissions d’ici à 2020, avec un passage à 30% conditionné aux actions des autres pays. « Depuis mars 2007, l’Europe n’a pas avancé d’un millimètre. Et en janvier 2010, sa position sonne comme un disque rayé. L’Europe, mise de côté à Copenhague faute de leadership, répète les mêmes erreurs un mois plus tard, comme si rien ne s’était passé au Danemark. Si elle veut créer une nouvelle dynamique sur la scène internationale, l’UE doit passer à 30% sans plus attendre, dès le 11 février prochain, lors du prochain Conseil européen ! » s’insurge Karine Gavand, de Greenpeace France.

L’hypocrisie des financements annoncés

  • Pour Romain Benicchio, d’Oxfam France, « L’Union européenne doit aussi sortir de l’hypocrisie sur la question des financements précoces pour le climat ; non seulement l’essentiel des sommes promises ne seront que du recyclage de lignes budgétaires déjà existantes mais elles seront en plus comptées au titre de l’Aide Publique au Développement. Il est pourtant essentiel que ces financements soient additionnels, mais aussi harmonisés et coordonnés au niveau européen afin qu’ils soient affectés aux actions les plus urgentes. »


La fragilisation des acquis juridiques

  • L’accord de Copenhague est une simple déclaration politique qui risque d’affaiblir les bases du droit international sur le climat. Il revient sur le principal acquis du protocole de Kyoto, la fixation d’un plafond d’émissions juridiquement contraignant à ne pas dépasser. Pour Morgane Créach, du Réseau Action Climat, « cet accord politique ne doit en aucun cas remplacer les textes juridiques actuellement en discussion dans les deux voies officielles de négociation, sous le Protocole de Kyoto et la Convention climat. La naissance d’une troisième voie marquerait le triomphe de l’approche américaine, basée sur des engagements volontaires des pays, en totale inadéquation avec les impératifs scientifiques ».
    La question est maintenant de savoir si ce texte peut servir d’ancrage politique pour débloquer certains points des textes juridiques et parvenir à la conclusion d’instruments juridiquement contraignants lors du prochain sommet qui se tiendra au Mexique, fin 2010.

Contacts presse :

  • Morgane Créach, Directrice Pôle International - Réseau Action Climat (RAC-F) : 06 59 25 19 31
  • Elise Buckle, Responsable Energie Climat - WWF : 06 43 82 02 77
  • Karine Gavand, Chargée de campagne Climat/Energie - Greenpeace : 06 77 04 61 90
  • Romain Benicchio, Chargé de campagne Climat - Oxfam France Agir ici : +41 79 79 79 990