Renault et la Formule 1
Article mis en ligne le 29 septembre 2009
dernière modification le 4 octobre 2014

Chronique de Bernard Maris sur France Inter.

Renault doit-il abandonner la formule 1, même si la Fédération Internationale automobile passe l’éponge pour ses fraudes en Grand Prix ?

Renault est interdit de compétition pendant deux ans après avoir fraudé à Singapour, lors du Grand prix ; et c’est une faute assez grave puisqu’un pilote avait été incité à provoquer un accident pour favoriser la victoire d’un copain. Bon, mais on va tout de même pas en faire une histoire, après tout les cyclistes se dopent, et les match de foot sont truqués, mais les spectateurs sont contents, c’est l’essentiel. Pourquoi Renault fait de la compétition ? Pour l’image de Renault. Pour que l’acheteur d’une Renault, même la plus banale, se dise : « J’ai un sacré matériel entre les mains et sous les jambes. J’en ai. Je fonce ». Renault, avec son patron visionnaire, s’était lancé dans le 4x4 au moment où tout le monde abandonnait enfin le 4x4 qui entrainait l’économie automobile américaine dans le gouffre. Renault heureusement commence à songer au véhicule électrique.

Alors pourquoi continuer à valoriser les bolides ?

C’est assez incompréhensible. Il n’y a pas plus anti-écologique qu’un circuit de Formule 1. C’est une boucle de bitume, qui détruit un paysage, et sur laquelle des bolides crachent du CO2 dans un tapage d’enfer. Pourquoi dépenser, comme Renault, 200 ou 300 millions d’euros par an – les finances de Renault ne sont pas si bonnes – pour ça ? Parce que la vitesse fait vendre des voitures... Mais voila que la vitesse est combattue désormais dans les pays européens. Car vitesse égale mort, mais aussi parce que vitesse égale pollution. La seule raison pour laquelle Renault voudrait garder son âme ou son image de fabricant de bolides pour assassins du week-end serait... de vendre ses véhicules dans des pays qui ne sont pas encore équipés en voitures, l’Inde, le Brésil, la Chine, l’Europe de l’Est.

Vous trouvez ça immoral ?

Profondément immoral. C’est comme les cigarettes. On combat le tabac en Europe – et en France en particulier – et on se dépêche de vendre des cigarettes dans des pays qui ne fumaient pas. L’Afrique, par exemple, pays non fumeur, a été largement sollicité par les producteurs de cigarettes et le tabagisme y a fortement augmenté.

La voiture vroum-vroum va disparaître enfin de nos paysages, mais le CO2 des pays en développement va continuer à détraquer notre climat. D’où l’excellentissime idée d’une taxe carbone aux frontières, non pour arrêter le carbone, évidemment, mais les produits extérieurs à l’Europe à fort contenu carbone. Nota bene : mauvaise nouvelle, le bonus pour voitures économes en CO2 diminue l’année prochaine...

La phrase du jour : « La vitesse est la forme moderne de la pesanteur » Paul Morand (L’homme pressé)

France Inter