« écrits pacifistes » de Jean Giono
Article mis en ligne le 27 septembre 2011

« écrits pacifistes », extraits de refus d’obéissance :

"Je n’ai pas eu le courage de déserter. Je n’ai qu’une seule excuse : c’est que j’étais jeune. Je ne suis pas un lâche. J’ai été trompé par ma jeunesse et j’ai également été trompé par ceux qui savaient que j’étais jeune...Il y avait là tous les professeurs que j’avais eus depuis la classe de sixième, des magistrats, des ministres, le président qui signa les affiches, enfin tous ceux qui avaient un intérêt quelconque à se servir du sang des enfants de vingt ans. Il y avait aussi - je les oubliais mais ils sont très importants- les écrivains qui exaltaient l’héroïsme, l’égoïsme, la fierté, la dureté, l’honneur, le sport, l’orgueil.

extraits de lettre aux paysans :

Et ne croyez pas que ce soit la transformation que les chimistes font subir au blé qui soit un acte de guerre. Non, l’acte de guerre c’est quand un homme possède six cent mille kilos de blé alors qu’il lui suffit de six cents kilos de blé pour sa nourriture ; c’est quand il ne donne pas ce surplus. Vous me dites qu’alors c’est beaucoup de peine six cent mille kilos de blé et qu’il n’est pas juste de donner cette peine. La vérité c’est qu’il n’est pas juste de prendre cette peine. La paix est la qualité des hommes de mesure.

‎« écrits pacifistes », recherche de la pureté :

Quand on a pas assez de courage pour être pacifiste on est guerrier. Le pacifiste est toujours seul. Il n’est pas dans l’abri d’un rang, d’une troupe ; il est seul. S’il parle, s’il emploie le pluriel, s’il dit « nous », il dit « nous sommes seuls ». Il n’y a jamais eu et il n’y aura jamais de défilé pacifiste de n’importe quelle Bastille à n’importe quel Panthéon ; il ne court pas les rues.

« écrits pacifistes », précisions ; document lié, extrait de « message d’entrée au premier congrès des auberges de jeunesse, Toulouse, 1938 » :

« à l’âge où vous êtes, maintenant libres, et l’amour vous a mis la main à l’épaule, on nous a pris, nous, et on nous a chargés du harnais de la guerre. Et nous n’avons pas osé affirmer notre force. Oui, à l’instant même où vous êtes maintenant, aussi forts que vous, nous avons été tout de suite prisonniers de la mort et pour nous tout a été fini. Comme si pour vous maintenant tout finissait et que le deux tiers d’entre vous soient jetés par terre, crevés et pourrissants. Car, nous avions écouté les poètes, les écrivains, les hommes en place de la génération hors-jeu ; et ils nous avaient jetés volontairement dans le massacre. Ceux d’aujourd’hui comme ceux d’hier prétendent parler au nom du bonheur des générations futures. Vous êtes vous autres la génération dont on nous parlait au futur, et dont notre martyre devait assurer le bonheur. L’avons nous fait ? Non. Nous avons au contraire permis des temps terribles. Si vous y consentez comme nous y avons consenti, et pour n’importe quelle motif(pour n’importe quelle patrie matérielle et idéologique) votre mort n’assurera le bonheur de personne. Ce sera votre mort. totalement inutile. »


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